Biographie
Il émane de 6 ½, le nouvel album des Innocents, un sentiment de lâcher-prise. Jean-Christophe Urbain et J.P. Nataf prennent chacun leur place. Un équilibre nourri par la douce énergie de leur histoire.6 ½, un album assumé.
Depuis Mandarineet la récompense des Victoires en 2016, la quatrième de leur carrière, la tournée a été longue et belle. Deux ans, plus de cent cinquante dates, des destinations nouvelles. Toujours une valise dans le couloir. Les Innocents découvrent la scène à deux, et s’y retrouvent, après une longue pause. Et comme un boomerang, un public au rendez-vous dès les premières notes des anciens tubes. Alors, ils brisent les verrous de l’inconnu, accordent leurs guitares, font entendre leurs nouveautés et se laissent aller avec simplicité, au plaisir de la scène.
Ensemble, il y a de la magie à se surprendre, à créer quelque chose d’unique. Des harmonies qui leur ressemblent, la pop musique qu’ils aiment depuis toujours. La balade n’a pas de fin, chaque album a l’ambition de faire mieux que le précédent. Mandarineétait né couvert d’un manteau longuement tricoté, comme pour se protéger des intempéries. Pour 6 ½, les Innocents, libérés de la pression du come-back, ont ouvert les fenêtres de la chambre de leurs retrouvailles. Vers un extérieur aux parfums d’été.
Leur carburant : ces rêves en pagaille qu’ils partagent. Cette envie toujours plus grande d’offrir de belles chansons, celles qui marquent les foules, celles qui colorent leur parcours depuis trois décennies. Accompagnés de Dominique Ledudal, réalisateur, ami et complice, ils ont quitté leur quotidien, leur Paris XXème. Trois semaines studieuses entre les murs du mythique studio ICP à Bruxelles, trente ans après y avoir enregistré leur premier album. Cette fois ci, car la méthode est souvent différente d’un disque à l’autre, Jean-Chri et J.P. sont arrivés chacun avec des titres, ou des esquisses personnelles. Dominique, indispensable présence, les aide à choisir, à donner un ton à ce nouvel album, à lier la musique et les caractères.
Un duo à cœur ouvert, des textes embusqués sous les accords et les mélodies. Jean-Christophe Urbain se dévoile, aussi impudique que sa pudeur l’admette. Et raconte ce plaisir renouvelé qu’il a pris à écrire, à « faire », à savourer cette chance de créer. J.P. Nataf surfe sur une énergie libérée, se noie toujours dans un trop plein d’idées, laisse l’urgence choisir contre l’exigence de faire « bien ». Heureux, simplement heureux de réaliser le rêve de ses 15 ans. Vivre de musique.
Et partager des émotions. « Tailler la plaine en Apache » et échapper au fantôme de l’amour qui obsède toute une vie et en rythme la cadence. Partager aussi de folles envies, « savourer dans les Cascades, des baisers, des calumets d’amour light». Vivre de musique pour convertir des souvenirs : Opale, ou la réminiscence de ce lieu attractif où l’on revient toujours s’accorder, se ressourcer. Mon Homme, parle du père absent et de cet héritage dilué au quotidien de l’instant. Des souvenirs aussi qu’on embarque vers les Iles d’Amnésie ou qui accompagnent « le redoux » d’un vieux Slow #1.
Un sixième album et demi . Brut de matières premières. On l’imagine joué dans une maison de famille baignée de lumière, au vieux parquet solide, égratigné par le temps. Un album porté par ses précédents, fort de quatre mains instrumentales, d’une double plume artistique.
Les Innos pour de vrai, intimes et cohérents, et, en jolie perspective, dix titres à fredonner.
Charlotte Boutte